Roulés dans la farine (1ère partie)
Un incident donne prétexte à Ussher pour régler la question avec fermeté : en Septembre 1879 Dudley le nouveau district commissioner en visite à Srogbé va saisir de l’alcool de contrebande. Sa garnison est en sous-effectif. Les autochtones leur reprennent la cargaison après les avoir malmenés physiquement. Deux semaines plus tard, le même Dudley rapporte que des officiers de la marine américaine (Upton et Steave) auraient conclu un accord avec les chefs agbosomé pour la cession de leur territoire y compris le territoire sur lequel les anglais viennent d’étendre illégalement leur juridiction contre des subsides pour une période de 99ans.
Les failles de l’annexion illégale apparaissent : les Américains prient les Britanniques de se retirer jusqu’à Kedji et démarrent immédiatement leur activité commerciale. En Mars, les chefs agbosomé avaient adressé également une pétition au gouvernement britannique pour qu’il se retire de leur territoire. Ils firent la sourde oreille se contentant de leur allouer des subsides insignifiants en guise de compensation (90 livres Sterling) . Les Agbosomé refusèrent de les toucher et usèrent de leur plein droit en signant un accord plus avantageux avec les Américains.
Les failles de l’annexion illégale apparaissent : les Américains prient les Britanniques de se retirer jusqu’à Kedji Cliquez pour tweeterUssher commence donc sa prise en main par une première mesure: reprendre les contrôles plus intensément. Ils avaient faibli depuis l’incident impliquant Ellis. Des renforts sont envoyés à Keta pour soutenir Dudley et tenir la position.
Fin Novembre, Ussher se déplace lui-même à Keta où il s’installe au fort de Prinzenstein accompagné d’un détachement fortement armé pour obtenir l’annexion de Denu, Aflao, Bè et Baguida (désormais nouveaux centres de contrebande). Les chefs locaux pris de peur envoient Christian Rottmann de Factorerie de Brême et Georges Williams le sonder. Ussher n’en a pas après eux. Il somme les chefs de se présenter devant lui dans un délai d’une semaine. Il conclura sa convocation aux autorités locales par un cinglant « je crois que vous aurez la sagesse d’obéir à cet ordre ».
Le 1er Décembre 1879, Ussher parvient à un accord provisoire avec les chefs et notables d’Aflao paraphé par lui-même, et le secrétaire colonial Hay pour la partie britannique et Kwashi Bruce, fils du chef Bruce pour la partie autochtone. Le lendemain avec les chefs agbosomé même résultat. Un accord définitif sera signé sur le navire de guerre HMS Dwarf le 6 Décembre 1879 avec les gens d’Aflao. Signeront les Chefs Bruce (James Qwamenah Bruce), Ankrah et Quakoe qui marqueront de leur croix (la signature des analphabètes) le document. Montant de l’opération, 500 dollars payables annuellement et d’avance et 12 ponchons (6.550 litres) de rhum à débarquer en franchise de droit de douane pour les gens d’Aflao. Pour les Agbosome de Denu, Adafianu et Adina, ce sera 1135 dollars à se répartir ainsi que 20 ponchons (10.920 litres) de rhum et 60 caisses de gin à débarquer librement.
Un accord définitif sera signé sur le navire de guerre HMS Dwarf le 6 Décembre 1879 avec les gens d’Aflao. Cliquez pour tweeterFin 1879, un vent d’optimisme porte les administrateurs coloniaux britanniques: il est question de propositions des gens de Bè et Baguida de céder leur littoral. Il n’en sera pourtant rien, jamais l’Union Jack ne flottera sur le littoral aujourd’hui togolais. Il ne faudra d’ailleurs pas attendre un mois pour qu’un autre son de cloche retentisse dans la presse anglaise de l’époque: la cession « pacifique et volontaire » telle que Ussher veut la faire croire à Londres est loin de la réalité. Le Daily News va jusqu’à affirmer qu’il y a eu contrainte, étayant ses propos par des incidents mettant en scène les populations d’Aflao et Denu protestant contre la cession faite par leurs chefs (et dont elles ne tirent elles-mêmes aucune contrepartie) et refusant que le drapeau britannique soit hissé sur leur plage. Ussher a sans doute dû user de sa poigne de fer pour faire plier les récalcitrants. Les Britanniques pensent à ce moment-là avoir définitivement exterminé la contrebande. Tout est si calme que le Capitaine Dudley se rend fin Janvier 1880 à Denu-ville (à l’endroit où se trouve actuellement le carrefour où bifurque la route menant à Accra) pour rencontrer James Bruce, ainsi que ses notables Accolatsè et Tamakloé qui lui indiquent faire de leur mieux pour asseoir l’autorité coloniale sur les territoires nouvellement annexés et craindre que le spectre de Denu apparaisse à nouveau à proximité de la nouvelle frontière à Bè et Baguida notamment. Le vent est cependant décidément à l’optimisme.